
Le Martinsloch de Grindelwald
Il existe aussi un Martinsloch à Grindelwald.....
Si vous cherchez « Martinsloch » sur internet, toutes les premières occurrences vous conduiront vers un trou dans la chaine de montagnes des Tschingelhörner entre le petit village de Elm dans la vallée glaronnaise de la Sernf et la station grisonne de Flims. Ce trou laissant passer les rayons du soleil deux fois par année aurait selon la légende été percé par l’ermite Martin au cours d’un combat héroïque contre un méchant géant.
Un peu moins célèbre, il existe aussi un « Martinsloch » à Grindelwald et il a aussi sa légende…
Deux fois par année, à la fin du mois de novembre et à mi-janvier, les rayons du soleil traversent la montagne au travers d’un trou naturel, le « Martinsloch », et atteignent l’église du village.
Les 27 et 28 novembre, ainsi que du 13 au 16 janvier, on peut voir ce point lumineux brillant depuis l'église et les environs du Kirchbühl. Le spectacle commence vers treize heure trente et dure (selon le point de vue de l'observateur) de trois à trente minutes.

Dans les alpes, la chaleur, le froid, le vent et l’érosion provoquent des formes particulières ; deux d’entre elles se font face dans la vallée de l’Unterer Grindelwaldgletcher.

Le « Martinsloch », aussi appelé « Heiterloch », est un trou rocheux d’environ 4 mètres de large et 2.5 mètres de haut situé à environ 2500 m d’altitude sur la partie finale orientale de l’Eiger, l’Ostegg. En face, de l’autre côté de la vallée, on peut voir une cuvette glacière en forme de muscles fessiers près de Stieregg, le Martinsdruck.
De cette configuration géologique est née une savoureuse légende ancestrale. Dans le livre « Challigroosi und Muggestutz, Grindelwalder Sagen » légendes rassemblées par Rudolf Rubi et illustré par Elisabeth Oehrli-Hasler (Grindelwald Heimatvereinigung, 1981) on trouve la légende "Martinsloch und Martinsdruck" que je vous raconte en quelques mots.

La légende du Martinsloch et du Martinsdruck
Il y a bien longtemps, plusieurs siècles, il n'y avait pas de glacier au fond de la vallée de l’Unterer Gridelwaldgletcher. Les montagnes de l'Eiger et du Mettenberg s'accrochaient l'une à l'autre, et aucune gorge entre Bäregg et Bonerren n’était suffisamment large pour permettre le passage de la rivière. Seule une brèche étroite dans la roche, offrait un passage aux eaux de fonte mêlées de blocs de glace qui étaient temporairement retenues derrière la barre rocheuse.
Normalement le ruisseau glaciaire dévalait la pente pour se jeter dans la forêt. Cependant, parfois, la pression de l'eau et des masses de glace pouvait devenir très puissante.
Un jour le barrage formé par la petite brèche a cédé, et en bas, une inondation dévastatrice a balayé et tout détruit sur son passage. Maisons et granges, hommes et animaux.
Au pied de la paroi rocheuse vivait Martin, un homme de grande stature et d’une force gigantesque. Il était lui-même en danger de mort lors des éboulements des masses d'eau et de glace. Il fallait trouver un remède… Il a grimpé dans l'étroite brèche, s'est appuyé le dos contre le côté du Mettenberg, et a appuyé ses pieds et son bâton contre l'Eiger.
Lors d’une puissante poussée, et un craquement s’entendit dans les montagnes alors qu'elles s'éloignaient l'une de l'autre. C'était fait : l'écart était maintenant grand, l'eau avait trouvé un écoulement régulier et suffisamment important ; le Gletcher s'est lui aussi mis en marche, mais lentement et sans danger pour les habitants du dessous. Mais Martin, dans son puissant effort, avait fait un trou dans l'Eiger avec son bâton, et ses puissantes fesses s'étaient enfoncées profondément dans le rocher du Mettenberg, signes encore visibles du déplacement de la montagne, appelé "le trou de Martin" et "la compression de Martin", un monument pour les temps éternels.

Mais combien plus précieux pour nous aujourd'hui que l'aperçu semestriel des rayons du soleil à travers le Heiteloch et du Gletcherlücke, qui offre une vue magnifique sur le Fiescherwand et le Finsteraarhorn ! L'image de la Fiescherwand au clair de lune argenté est d'une beauté surnaturelle. Et le dernier salut du soleil brillant sur le sommet rougeoyant du Finsteraarhorn, alors que les ombres du soir se trouvent déjà dans la vallée, est merveilleux.
Ironie des temps, cette vallée continua de faire parler d’elle.
Au cours des siècles le glacier de l’Unterer Grindelwaldgletcher s’est développé pour atteindre le fond de la vallée. Dès la première partie du 20ème siècle, il s’est petit à petit retiré laissant apparaître une moraine impressionnante. De nombreux éboulements rocheux donnèrent naissance au même endroit en 2005 à un lac glaciaire.
Ce lac, comme il y a quelques siècles, présentait un grand danger pour la population. D’ailleurs, il se vida de 570'000 m3 d’eau le vendredi 30 mai 2008 dans les eaux de la Lütschine provoquant des débordements importants. Un système d’alarme mis en place permit d’avertir à temps les zones habitées concernées. (https://www.planat.ch/fr/bilder/videos/bilder/videos-detail/vidange-du-lac-du-bas-glacier-de-grindelwald-2008)
En l’absence de Martin (!), ce sont des foreuses et de la dynamite qui creusèrent dans les roches calcaires un tunnel de débordement (janvier 2009 à au printemps 2010) limitant le niveau du lac et écartant tout danger. C’est toutefois toujours la nature qui décide : le lac se purgea de lui-même à la même période, naturellement, dans le Walchiloch, un moulin glaciaire, déjà observé au début du 19ème siècle. (https://www.myswissalps.ch/poi/446)
Merci à Marco Bomio, guide de montagne et directeur du Grindelwald Museum de m’avoir autorisé à traduire de larges extrait de son article et à utiliser ses photos du Martinsloch réalisées lors de son escalade en 2002. (http://www.marcobomio.ch/www.marcobomio.ch/MArtinsloch.html)
Le Grindelwald Museum (http://www.grindelwald-museum.ch) situé dans un bâtiment historique derrière l’église regorge de souvenirs historiques de la vallée. Je ne peux que vous en recommander la visite.